52 ancêtres en 52 semaines : #8 Antoine Tourville (1779-~1813)

Concevoir la vie de nos ancêtres entre les années 1780 et 1820 dans ce qui est le Québec aujourd’hui n’est pas chose facile. Bien sûr, les registres paroissiaux nous éclairent sur leurs liens familiaux, mais sans recensement ni date de décès, il y a peu à raconter. Heureusement, les contrats notariés nous permettent d’en apprendre un peu plus sur eux.

À force d’éplucher les minutiers des notaires, on s’aperçoit que les mêmes noms reviennent sans cesse, surtout dans les petits villages. On imagine ces gens-là très affairés, fréquenter assidûment l’étude de leur notaire, à l’occasion de l’achat ou la vente de terres, bénéficiant de conseils avisés sur la bonne marche de leurs affaires. Une visite chez le notaire n’avait pour eux rien d’extraordinaire. Pour d’autres, comme Antoine, cela ne devait se produire que lors d’occasions exceptionnelles.

Mais voyons d’abord ce que les registres paroissiaux nous révèlent au sujet de certains événements de la vie d’Antoine.

Ses parents, Joseph Tourville et sa deuxième épouse, Françoise Daunay, se sont mariés en 1766 à Lachenaie. Antoine, qui a été baptisé le 30 mai 1779 à Terrebonne, était le plus jeune enfant du couple. Avant lui, deux filles ont vu le jour, Marie-Angélique, probablement décédée en bas âge étant donné que je n’ai aucune trace d’elle si ce n’est son acte de baptême en 1770, et Marie-Louise, née en 1773 et décédée en 1832. Antoine avait également de nombreux demi-frères et demi-sœurs, notamment Joseph Tourville, mon arrière-arrière-arrière-grand-père, marié à Marguerite Fortin, et Michel Fortin, marié à Catherine Marié.

Antoine n’avait pas encore trois ans lorsque son père est décédé en 1782, à l’âge de 62 ans. En 1789, quelques mois avant son dixième anniversaire, il a perdu sa mère qui n’avait que 54 ans.

Qu’est-il arrivé à Antoine après le décès de ses parents? De fait, nous n’en saurions presque rien, si ce n’était de l’existence d’un acte notarié qui nous dévoile deux moments marquants de son existence.

Reportons-nous donc en ce vendredi 22 novembre 1799, alors qu’il se dirige vers l’étude du notaire Joseph Turgeon, à Terrebonne, accompagné de son parrain, Joseph Limoges, capitaine de milice de la ville.

Ce jour-là, Antoine signe un contrat d’engagement conclu entre Michel Rochelau dit Morrisseau et lui-même, par lequel il accepte de devenir son engagé pour les quatre prochaines années, soit du 20 novembre 1779 au 20 novembre 1803. Outre un salaire annuel de 132 livres, Antoine sera logé, nourri et blanchi, en échange de quoi il accepte d’exécuter toutes les tâches que Michel Rochelau lui demandera. Le contrat précise également qu’Antoine est d’accord avec les modalités qui y sont prévues puisqu’il vit dans la maison de Michel depuis 16 ans et qu’il en est satisfait.

Après la lecture de ce document, nous pouvons donc présumer que, vers 1783, alors qu’Antoine est âgé de trois ou quatre ans, il emménage chez Michel Rochelau, marié depuis un an avec Marie-Archange Charpentier, l’année du décès du père d’Antoine. Peut-être Françoise Daunay est-elle allée travailler comme servante chez les Rochelau et y habitait-elle avec ses enfants.

L’acte notarié nous informe également, par un ajout fait à la fin du document, que Michel et Antoine sont retournés chez le notaire Turgeon le 30 avril 1803. Michel Rochelau a accepté de payer à Antoine ce qui lui était dû et de résilier le contrat avant l’échéance du 20 novembre 1803. Vous vous demandez peut-être pourquoi? Il y a une bonne raison. Trois jours plus tard, soit le 2 mai 1803, Antoine épouse à Mascouche Josephte Amiot-Villeneuve.

Montréal, vers 1800. Panorama depuis un flanc du mont Royal. Archives du Musée McCord / Richard Dillon, (1772-1856), dessin (détail).

Montréal, vers 1800. Panorama depuis un flanc du mont Royal. Archives du Musée McCord / Richard Dillon, (1772-1856), dessin (détail). By Philippe Du Berger [CC BY 2.0 (http://creativecommons.org/licenses/by/2.0)], via Wikimedia Commons

Antoine et Josephte sont les premiers Montréalais de la famille Hubou-Tourville au 19e siècle, comme le prouvent deux actes de baptême de la paroisse Notre-Dame de Montréal concernant les deux enfants du couple : Joseph, né en 1803, et Josephte, née en 1805. Ces actes n’indiquent pas l’occupation du père, mais lorsque son fils et sa fille se marient à leur tour à la même paroisse, les actes stipulent que « feu [leur] père était boulanger de cette paroisse ».

Le seul indice voulant qu’Antoine n’ait pas vécu plus de 33 ans nous vient de l’acte du second mariage de Josephte Amiot-Villeneuve, le 2 février 1813, dans lequel elle est identifiée comme étant la veuve d’Antoine Tourville. Le jour de son mariage, Josephte déclare résider temporairement à l’Île Jésus (aujourd’hui Laval), mais être domiciliée dans la paroisse de St-Joseph à Rivière-des-Prairies (sur l’île de Montréal).

Il y avait beaucoup de notaires à Montréal au début du 19e siècle alors, qui sait? Je découvrirai peut-être d’autres détails sur la vie d’Antoine. Et qui aurait pu prédire que le petit-fils de cet homme, Louis Tourville, serait le co-fondateur de la Banque d’Hochelaga, aujourd’hui la Banque Nationale du Canada, en plus d’être un homme d’affaires important ainsi qu’un politicien? Il me reste bien plus que 52 ancêtres à raconter.

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Belle découverte sur Internet : Extrait du livre de renvoi officiel de la paroisse de Montréal (1872)

Votre ancêtre habitait-il la paroisse de Montréal en 1872? Plus précisément, les villages d’Hochelaga, de la Côte de la Visitation, de la Côte St-Louis, de St-Jean-Baptiste ou de la Côte-des-Neiges? Aimeriez-vous savoir s’il était propriétaire ou locataire?

Dans ce cas, vous pourriez être intéressés par ce document que j’ai découvert sur Internet.

Extrait du livre de renvoi officiel de la paroisse de Montréal [microforme] : comprenant les villages incorporés d’Hochelaga, de la Côte de la Visitation, de la Côte St- Louis, de St-Jean-Baptiste et de la Côte-des-Neiges / préparé et publié par L.W. Sicotte (1872)

Ce livre donne pour chacun des lots des villages susmentionnés le nom de son propriétaire et sa dimension. Le numéro devant le nom du propriétaire est le numéro officiel du lot. Si vous téléchargez la version PDF, vous pouvez aisément y faire une recherche.

extrait officiel

Pour les curieux, les rues de Montréal mentionnées dans l’image ci-dessous sont aujourd’hui la rue Rachel, l’avenue de l’Hôtel-de-Ville, l’avenue Duluth et la rue de Bullion

Jumelé au recensement de 1871, cet ouvrage peut se révéler fort utile.

J’y ai trouvé le nom de Honoré Tourville qui habitait St-Henri ainsi que les noms d’Élisabeth Lamoureux, veuve de Louis Tourville, de son fils Médard et de deux de ses gendres, Denis Barrette et Napoléon Gauvreau, qui habitaient le village St-Jean-Baptiste.

Bonnes recherches!

52 ancêtres en 52 semaines : #3 Malvina Tourville (née Hogue) (1859-1880)

En novembre dernier, lors de mon voyage à Salt Lake City, j’ai trouvé un article dans le Daily Arkansas Gazette daté du 9 mai 1880 qui relatait une manchette datée du 30 avril précédent en provenance de Montréal. Une femme serait morte de peur en voyant passer devant chez elle deux hommes gravement brûlés sur leur lieu de travail, les frères Couvrette. On donnait le nom de « Mrs. Tourville » sans autre renseignement.

La seule personne dans ma base de données qui est décédée en 1880 et qui vivait à Montréal à cette époque était Malvina Hogue, épouse de Moïse Tourville, mais je l’ai écartée d’emblée puisqu’elle était décédée le 19 avril. Je décide donc d’aller sur le site de la BANQ pour vérifier si le journal La Minerve en ferait mention. Comme la manchette était datée du 30 avril, j’ai parcouru le journal au complet. Rien. L’édition du 1er mai peut-être? Oui! Il s’agissait bien de Malvina Hogue, le journal La Minerve donnant beaucoup plus de détails sur les circonstances de son décès que celui de l’Arkansas. Le 19 avril? Eh! bien c’était une erreur de transcription de ma part. J’ai vérifié le registre de Notre-Dame de Montréal et c’est bien le 29! C’est maintenant corrigé dans la base de données.

Voici les deux articles en question :

Daily Arkansas Gazette

Provenance : Daily Arkansas Gazette, 9 mai 1880, page 1

La Minerve 01051880 malvina hogue tourville

Source: Bibliothèque et Archives nationales du Québec, La Minerve, 1er mai 1880, page 1

Malvina Hogue est née le 16 juin 1859 à Montréal (Hochelaga). Elle était la fille de Pierre Hogue et de Josephte Boyer. Malvina a épousé Moïse Tourville le 22 octobre 1878 à St-Henri. Elle a eu une fille prénommée Évélina née le 31 août 1879 à St-Henri. Il s’agit de l’enfant mentionné dans le texte.

Cet article est vraiment tombé à point! Je travaille sur la famille de Moïse Tourville et sur celle de sa deuxième épouse, Azilda Labelle, qu’il a épousé à Chicago en 1884. Cet homme a eu un parcours fascinant. Lui et sa famille feront l’objet d’un prochain article.

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