Deux épines généalogiques : Étienne Arpajou (1834-?) & Peter Parish (?-1884)

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Peter Parish. Je me souviens de la première fois que j’ai vu ce nom. C’était à l’époque où j’essayais de retrouver la trace de Matilda Tourville à Ferrisburgh, au Vermont, avant 1865, année de son mariage avec Louis Tourville, fils de Charles Tourville et de Sophie Arpajou. Je venais de découvrir que son nom de jeune fille était LaQuire (ou Lequin, au Québec).

J’étais donc plongée dans le recensement américain de 1860 pour la ville de Ferrisburgh, espérant y lire le nom de Matilda. Je tombe alors sur un certain Peter Push, âgé de 25 ans, et sur une Mary Push, âgée de 15 ans. Le recensement m’indique que ce couple s’est marié au cours de l’année. Ces deux personnes habitant avec des Laguin, je me suis dit que cette Mary était peut-être parente avec eux ainsi qu’avec Matilda. Je n’avais pas tort. J’ai élucidé la filiation plus tard : Mary était la cousine germaine de Matilda.

peter push 1860

Je m’étais conséquemment lancée à la recherche d’un acte de mariage pour Peter et Mary Push. Malgré le fait que seule la fiche de l’index de l’État civil du Vermont ait survécu, j’ai quand même pu apprendre que le mariage de Peter Parish et Mary Laquier avait été célébré par un ministre méthodiste, le 24 septembre 1859, à Ferrisburgh. J’ai pu consigner les informations suivantes : Mary avait 15 ans, elle était née au Canada-Est (province de Québec aujourd’hui), il s’agissait de son premier mariage (Dieu merci!) et ses parents se nommaient John et Mary Laquier; Peter, lui, avait 25 ans, né aussi au Canada-Est, il s’agissait de son deuxième mariage, et ses parents se nommaient Joseph et Mary Parish.

C’est une blague, ou quoi?! Je rêvais d’un Hyacinthe ou d’une Émérentienne. Vous savez, le type de prénom hyper facile à repérer dans le Lafrance de Généalogie Québec. Parish… J’ai eu beau me creuser la tête, je ne pouvais toujours pas voir de quel nom canadien-français ce nom de Parish pouvait bien dériver. Alors j’ai laissé tomber.


Étienne Arpajou. Je me souviens de la première fois que j’ai vu ce nom. C’était dans le répertoire des mariages de l’église St. Peter à Vergennes, au Vermont. J’ai bien évidemment tout de suite fait le lien avec Sophie Arpajou. Étaient-ils parents? J’ai facilement trouvé Étienne Arpajou dans les registres du Québec : né le 25 mai 1834, baptisé à Saint-Jude, dans le comté de Richelieu, au Québec, Étienne était le neveu de Sophie et ses parents étaient Joseph Arpajou et Marie Gazaille dite Saint-Germain.

Étienne (Stephen dans le répertoire paroissial) a épousé Ellen Saint-Germain le 13 octobre 1856 à l’église St. Peter de Vergennes. Le même jour, Sophronie Arpajou épouse Israël Saint-Germain. Malheureusement, je n’ai jamais été en mesure de confirmer l’identité de Sophronie. Si elle était la soeur d’Étienne, elle aura peut-être été baptisée sous un autre prénom. J’ai eu plus de chance avec Ellen et Israël, cependant ; ils étaient frère et soeur. Ellen, baptisée Éléonore, et Israël, baptisé Louis Israël, étaient les enfants de Peter (Pierre) Saint-Germain et de Marguerite Sorel.

Je n’ai jamais rien vu ni sur Stephen (ou Étienne) ni sur sa femme Ellen dans le recensement américain de 1860. C’est comme s’ils avaient été enlevés par des Martiens. Ça m’a embêtée pendant un bon bout de temps, j’ai même pensé qu’Étienne avait peut-être participé à la Guerre civile et qu’il y avait perdu la vie. Je ne le trouvais nulle part. Alors j’ai laissé tomber.


La publication en 2010 du répertoire de baptêmes de l’église St. Peter de Vergennes a changé ma vie. J’étais littéralement folle de joie! Enfin, une nouvelle piste! Voici des entrées extraites du répertoire :

  • Arpagoux, Stephen, né 20 oct. 1857, Ferrisburgh, baptisé 14 nov. 1857, parents : Stephen Arpagoux et Eleonara St-Germain, parrain et marraine : Ambrose Ploude et Margaret Sorel.
  • Arpagoux, Henry, né 6 juillet 1860, Ferrisburgh, baptisé 22 juillet 1860, parents : Stephen Arpagoux et Celina Leguin, parrain et marraine : John B. Forcier et Marie St-Germain.
  • Arpagoux, Edward, né 1er nov. 1861, baptisé 9 févr. 1862, parents : Stephen Arpagoux et Celina Leguin, parrain et marraine : Baptiste Letient et Mathilda Letient.
  • Arpagoux, Julia, née 20 janv. 1864, baptisée 14 févr. 1864, parents : Stephen Arpagoux et Celina Leguin, parrain et marraine : Israël St-Germain et Vitalia Plante.
  • Arpagoux, Francis, né 13 oct. 1865, baptisé 26 nov. 1865, parents : Stephen Arpagoux et Celina Leguin, parrain et marraine : Francis Leguin et Marie Leguin.

Eh bien! Dites donc! avez-vous remarqué? Étienne a épousé une dénommée Celina Lequin. Malheureusement, je n’ai jamais pu mettre la main sur aucun acte de mariage, civil ou religieux, pour ce couple. Rien non plus à leur sujet, dans le recensement américain de 1860.

Il y a deux ans, alors que je travaillais à ce qui allait devenir mon Projet Vermont, j’ai dressé la liste de tous les Canadiens-français énumérés dans le recensement américain de 1850 pour les villes de Ferrisburgh et de Vergennes. En jumelant cette information à celle extraite du nouveau répertoire de baptêmes de St. Peters, j’ai ainsi pu identifier beaucoup de familles et les retracer au Québec.

Les Saint-Germain et les LaQuire voisins pour l'éternité au cimetière Saint Marys, Brandon, Rutland County, Vermont

Les Saint-Germain et les LaQuire voisins pour l’éternité au cimetière Saint Marys, Brandon, Rutland County, Vermont


Salt Lake City, novembre 2014. C’était un dimanche, la bibliothèque était fermée; je me suis dit que je devais en profiter pour me consacrer de nouveau à la recherche d’Étienne Arpajou.

Encore une fois, j’ai passé en revue la liste des enfants. J’ai consulté les recensements : rien de rien. Je me suis ensuite tournée vers le site Family Search. Tiens, cherchons un « Henry », né aux environs de 1860 au Vermont. Parmi toutes les entrées pertinentes, celle-ci attire tout particulièrement mon attention :

Ferrisburgh, naissances pour l’année 1860, ligne 21 :

  • 6 juillet 1860, Henry Parish, né dans le District 1, parents : Peter et Mary, résidence des parents dans le District 1, le père est journalier, le père est né à Vergennes, la mère, à Ferrisburgh.

Hum! Encore ce Peter Parish. Mais ce n’est pas le bon Henry! Je regarde toutefois de plus près et je remarque la date. Je me précipite sur ma base de données pour consulter la fiche d’Henry Arpajou. I-N-C-R-O-Y-A-B-L-E!!! Ils sont nés le même jour et au même endroit!

Bon, on respire par le nez! Attendez… LaQuire?! Les épouses des deux hommes ont le même patronyme! Je n’ai jamais vraiment fait de recherches sur Mary Parish, mais en fouillant un peu plus, je me suis rendu compte que Celina et Mary pourraient être une seule et même personne. J’avais déjà identifié les parents de Mary comme étant Jean-Baptiste Lequin [John LaQuire] et Marie Saint-Germain. De plus, je me souvenais qu’il s’agissait du deuxième mariage de Peter Parish. Ses parents se prénommaient Joseph et Mary… Joseph Arpajou et Marie Gazaille dite Saint-Germain?

J’examine alors plus attentivement le relevé civil des naissances pour Ferrisburgh concernant la période allant de 1856 à 1859 et je note ceci :

Ferrisburgh, naissances pour l’année 1857, ligne 8 :

  • 20 nov., Peter Alpare, sexe masculin, né à Ferrisburgh, parents : Peter et Laura Alpare, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est journalier.

Ferrisburgh, décès pour l’année 1857, ligne 11 :

  • 30 nov., Laura Alpare, âgée de 16 ans, 10 mois et 11 jours, sexe féminin, mariée, cause du décès : morte en couches, décédée à Ferrisburgh, lieu de naissance : Ferrisburgh, parents : Peter et Margaret German.

Ferrisburgh, décès pour l’année 1858, ligne 13 :

  • 3 janv., Peter Alpare, âgé de 1 mois et 12 jours, sexe masculin, célibataire, cause du décès inconnue, résidence des parents : District 1, né dans le District 1, nom des parents : Peter et Laura.

Allons, reprenons ce recensement américain de 1860 pour Ferrisburgh. Peter et Mary Push [Parish], pas d’enfant, pas d’Henry. Et Henry Parish n’est pas encore décédé puisqu’il est énuméré en 1880. Bien entendu, aucune trace de la famille dans le recensement de 1870!

Comme j’étais à Salt Lake City à ce moment-là, mon amie Rhonda, qui est généalogiste, me dit que l’enfant étant né en juillet 1860, il n’a pu être énuméré, car la date officielle du recensement est le 1er juin. Puisqu’elle me confirme que ma théorie tient la route, je lui demande : « Comment puis-je le prouver? » Parce que, finalement, à part une intuition, le seul indice valable que je possède est que lorsque Peter est « présent », Étienne est « absent ».

Je décide donc de vérifier les relevés civils de Ferrisburgh, cette fois pour la période allant de 1861 à 1870 et j’ai trouvé ce qui suit :

Ferrisburgh, relevés des naissances pour les enfants de Peter et Mary Parish :

  • Jesse P. Parish, né le 2 oct. 1865 dans le District 1, résidence des parents : District 1, le père est fermier, parents nés au Canada-Est
  • Peter Parish, né le 3 sep. 1867 dans le District 3, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est journalier, parents nés au Canada
  • John Parish, né le 6 juillet 1869, dans le District 3, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est journalier, parents nés au Canada

Ferrisburgh, relevés de décès pour l’année 1870, ligne 8 :

  • 9 mars, Mary (Laquire) Parish, âgée de 27 ans, sexe féminin, mariée, cause de décès : consomption, résidence dans le District 3, née au Canada, ses parents sont John et Mary.

Peter s’est marié une troisième fois avec Emelina Geally (ou Jelly), née dans l’État de New York. Le mariage a été célébré à la Congregational Church de Vergennes même si la fiche de l’index des relevés civils du Vermont indiquait que le célébrant était un prêtre catholique. C’est pour cela qu’il faut toujours remonter à la source! Leurs enfants n’ont pas été baptisés, mais j’ai trouvé les naissances suivantes dans les registres civils de Ferrisburgh :

  • Lucy Parish, née 14 août 1871 dans le District 3, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est journalier, le père est né au Canada, la mère, à Chazy, NY
  • George Parish, né le 17 janv. 1873, dans le District 3, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est fermier, père né au Canada, mère née à West Chazy, NY
  • James Parish, né le 12 juillet 1878, dans le District 3, résidence des parents : Ferrisburgh, le père est journalier, père né au Canada, mère, à West Chazy, NY (initialement, il était écrit Canada mais la correction a été faite en raison de la « déclaration de la fille de Peter et d’Emeline, Lucy Parish Perkins »)

Janvier 2016, Longueuil, chez moi, assise devant ma bibliothèque. Je travaille sur le Projet Vermont et j’ai de la difficulté avec un nom de famille. Il commence par la lettre « O ». Je consulte tous les répertoires paroissiaux que j’ai. Je n’oublie jamais de vérifier le répertoire d’Our Lady of Mount Carmel de Charlotte, au Vermont, parce que cette église est située si près de Ferrisburgh, que beaucoup d’enfants de cette ville y ont été baptisés. Puis je suis tombée sur ceci :

  • Olpayou, George, né le 17 janv. 1873, Ferrisburgh, baptisé 10 mars 1873, parents : Stephen Olpayou et Ermina Joyal, parrain et marraine : Louis O’Brien et Justine Fountain
  • Olpayou, Marcel, né 12 janv. 1878, Ferrisburgh, baptisé 24 févr. 1878, parents : Stephen Olpayou et Erma Joyal, parrain et marraine : Marcel Guedes et Julia Laflamme

M’avez-vous entendu crier? Comment aurais-je pu aller dormir comme si de rien n’était après avoir fait cette découverte alors qu’il est presque minuit, la veille du retour des vacances de Noël? Non, je ne pouvais tout simplement pas!

En jetant un coup d’oeil au recensement américain de 1880, maintenant que je savais et que j’en avais la preuve, chaque enfant semble bien être le bon :

  • Franklin Parish, âgé de 13 ans, est Jesse P ou Francis, né le 2 ou le 13 octobre 1865. Il est plutôt âgé de 14 ans au moment du recensement. Il est indiqué qu’il est handicapé (bossu).
  • Peter Parish, âgé de 12 ans, né le 3 septembre 1867.
  • John Parish, âgé de 10 ans, né le 6 juillet 1869.
  • Lucy Parish, âgée de 8 ans, née le 14 août 1871.
  • George Parish, âgé de 7 ans, né le 17 janvier 1873.
  • James Parish, âgé de 2 ans, né le 12 juillet 1878 (inhumé sous le nom de James Marcelle).

Alors permettez-moi de vous présenter Étienne Arpajou, alias Peter Parish, né en 1834, marié trois fois : d’abord avec Eleonara Saint-Germain; ensuite, avec Marie Celina Lequin; et puis, avec Emelina Joyal. Il a vécu à Ferrisburgh de 1856 approximativement jusqu’à au moins 1880 et a probablement ensuite déménagé à Brandon, au Vermont, où il est décédé des suites de la maladie de Bright (insuffisance rénale chronique), le 20 juillet 1884. Je ne sais pas dans quel cimetière il a été inhumé et j’ai bien peur que nous ne le sachions jamais. Je n’ai jamais rien trouvé sur le décès de sa troisième femme, Emelina. Elle est peut-être décédée avant le recensement américain de 1900.

Le nom Arpajou a également été écrit « Olpayou » dans le répertoire de St. Joseph à Burlington, pour le nom d’un parrain cette fois-ci. Comment est-ce possible que je n’aie pas remarqué ces deux baptêmes dans le répertoire de Charlotte? Je n’en ai aucune idée!

Grâce à la recherche que j’ai faite sur les Saint-Germain, j’ai découvert que Nettie Tourville, la soeur de Louis, était mariée à Joseph Saint-Germain, fils de Pierre Saint-Germain et de Marguerite Sorel. Comme vous pouvez le constater, il existe beaucoup de liens entre les familles Arpajou, LaQuire, Saint-Germain et Tourville.

Voilà, vous savez tout! Mon « obsession » pour les Canadiens-français du nord du comté d’Addison a commencé avec ces quatre familles.


 

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6 réflexions sur « Deux épines généalogiques : Étienne Arpajou (1834-?) & Peter Parish (?-1884) »

  1. oui. je vous entendu crier.
    Continuez a nous divertir avec vos recherches palpitantes. Merci!

  2. Incroyable ! Comment fais-tu avec tous ces changements de nom ?? Il faut être sacrément persévérant, faire des hypothèses insensées… qui se vérifient ! et avoir un peu de chance aussi !
    Bravo pour cette belle enquête !

    • Merci Marine! 🙂

      Si tu voyais les noms de famille dans les registres paroissiaux du Vermont dans les années 1840! Du charabia! Il faut vraiment tous les passer en revue et comparer le nom des parents. Oublie l’ordre alphabétique! Le prêtre était Irlandais et les Canadiens-français souvent analphabètes.

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